1949. LES SAISONS MAROCAINES
1949 L’influence atlantique possède des vertus
toniques et vivifiants dont est plus ou moins dépourvue la Méditerranée. C'est
pourquoi l'on peut annoncer le plus brillant avenir aux diverses plages qui se
succèdent sur la côte atlantique du Maroc D'AGADIR jusqu'à Port-Lyautey.
Les chaleurs de l'été ne sont guère supportables au Maroc
que sur les hauteurs de l'Atlas ou sur les plages de l'Océan qui jouissent alors
d'un climat comparable à celui de la Provence et de la Côte d'Azur.
La lumière seule y est peut-être plus intense, mais la température en est pareillement idéale.
La lumière seule y est peut-être plus intense, mais la température en est pareillement idéale.
Mazagan. La pergola
fleurie du jardin public
|
Déjà
Lyautey voyait en Mazagan le « Deauville » marocain. Aujourd'hui, Aïn-Diab (la plage de Casablanca)
possède des clubs et des établissements balnéaires de premier ordre. Et si,
près de Port-Lyautey, Mehdia n'en est encore qu'à sa préhistoire, la splendeur
de son immense plage de sable, le charme encore sauvage de son arrière-pays, la
proximité immédiate de Rabat, permettent de lui prédire sans crainte un proche
et prestigieux destin. Cependant, l'été ne sera jamais une saison de grand
tourisme au Maroc. A l'intérieur du pays, les chaleurs sont trop violentes. Le
paysage chatoyant de fleurs multicolores, hirsute de moissons surabondantes
trois mois plus tôt, succombe à partir de juillet sous le feu terrible du
soleil africain.
Aussi la pluie, quand elle
survient aux approches de l'automne, n’a-t-elle pas au Maroc le même visage
triste qu'on peut lui voir dans les régions nordiques.
Nulle mélancolie, nul « spleen
», ne s'en dégagent.
Camp-BOULHAUT. Vendanges marocaines. |
Mais une joie violente au contraire, comme sont violentes
les averses, une joie qui se reflète aussi bien sur les visages que dans les
paysages où reverdissent inespérément les arbustes autour des oueds débordés. La terre
se gorge d'eau. Et le ciel, sans lésiner, lui verse d'énormes rasades, des
cataractes de cette eau qu'elle a tant souhaitée. Puis, au bout d'un jour ou
deux de cette aquatique orgie, dans une atmosphère délicieusement rafraîchie, le
soleil reparaît durablement et fait alors chanter les couleurs avec une
délicatesse sereine qu'elles ne retrouveront peut-être en nulle autre saison,
même au plus exquis de l'hiver.
Aussi peut-on dire que c'est une
hérésie (fort répandue, du reste), de penser que le Maroc ne se doit visiter
qu'à partir de décembre et jusqu'à la mi-juin. En vérité, la saison des
vendanges, pour méconnue qu'elle soit encore, est une des plus belles saisons
du Maroc. La relative solitude dont jouit alors le visiteur lui permet de
découvrir le pays dans son plus authentique visage. C'est le meilleur moment
pour saisir le Maroc dans sa séduisante intimité.
A quelque deux heures de
voiture, l'on peut s'adonner aux joies du ski sur les magnifiques pentes
neigeuses de l'Oukaimeden. C'est là d'ailleurs que se disputent les
championnats de l'Afrique du Nord.
Le début de l'hiver au Maroc
donne le signal d'ouverture de 1 la grande saison mondaine.
Marrakech au milieu de ses
palmes, de ses oliveraies ceignant les Aguedals, de ses mimosas tout près
d'éclore, de ses orangers surchargés de fruits éclatants, Marrakech est la
reine incontestée de l'hiver nord-africain. L a splendeur du site, une température
qui ne descend à peu près jamais au-dessous de 0°, le pittoresque si purement
médiéval de la médina, un programme de festivités prestigieuses, tendent d'année
en année à faire de Marrakech l'une des stations d'hiver les plus recherchées
du monde.
Championnat de
ski du
Maroc à l'Oukaimeden.
|
Dans le Moyen Atlas, à proximité
de Fès, d'autres stations de sports d'hiver acquièrent pareillement chaque
année plus d'importance. C'est Bou Iblane, c'est Azrou, et c'est Ifrane qui,
oasis de verdure en été, tout enneigée en hiver, évoque alors mainte charmante
station des Alpes.
La joyeuse sérénité des hivers
marocains n'enchante pas seulement en montagne, partout elle suscite des
impressions d'un exotisme et d'une saveur inoubliables, qu'elle possède la
fraîcheur des oranges cueillies sous la neige étincelante ou qu'elle se charge du
parfum capiteux des mimosas annonciateurs du printemps
Le printemps éclate au Maroc
avec une frénésie qu'on ne saurait traduire. Certes l'on peut bien écrire que «
la terre alors se surcharge de fleurs », mais cela n'exprime en rien l'immense
floraison délirante de couleurs qui recouvre la campagne marocaine de son dense
tapis. Il faut voir ces myriades et ces myriades de fleurs se fondre jusque dans
les lointains en nappes inouïes de jaunes, d'orangés, de mauves, de rouges ou
de bleus purs. Les peintres eux-mêmes désespèrent d'exprimer cet éblouissement,
cette féerie de couleurs jouant dans la lumière incomparable.
AZILAL. Amandiers en
fleurs.
|
Le
printemps qui
s'étale ainsi dans les plaines, qui éclate dans les oasis, monte pareillement à
l'assaut des montagnes où les sous-bois des admirables forêts de cèdres
s'enchantent de l'envahissement bleu des iris. Dans les villes, partout les
jardins débordent de fleurs et de parfums. Bougainvilliers mauves, pourpres,
violets, déferlant en vagues géantes, éclaboussant les murs jusqu'au sommet des
maisons, mousse d'or des mimosas, taches rouges des ibiscus et des géraniums à
taille d'arbuste formant des buissons, grimpant comme lierre au long des
pergolas ; sauges sanglantes, tendres azalées, magnolias immenses, maquis de
roses multicolores. C'est l'époque des grandes randonnées touristiques dans le
Sud et tout au long de l'Atlantique dont les eaux sous le soleil déjà chaud
s'offrent à des bains délicieux, tandis que l'Europe grelotte encore dans ses
brumes.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire